<br /> C'est bien d'accorder en dialectique amour et persévérance. Chez An San Suu Kyi, comme chez Nelson Mandela, Martin Luther King, Gandhi, cela a du sens...<br /> <br /> <br /> Je me méfie intellectuellement beaucoup du mot "amour" : au nom de l'amour, on a justifié beaucoup d'intolérances, de violences et même de situations ou de structures d'injustices. Durant<br /> l'Ancien Régime, les riches bourgeois, le clergé et les aristocrates avaient leurs œuvres de charité au nom de l'amour du prochain ! Bill Gates ou d'autres reprennent les vieilles thèses de<br /> Carnégie ou de Rockfeller qui avaient "leurs pauvres" ! Tout cela dans l'arbitraire, en fonction de leurs désirs subjectifs et de leurs sentiments !<br /> <br /> <br /> Il y a des amours étouffants, fusionnels, des amours culpabilisateurs, des amours idolâtrés destinés à tuer le langage... sans oublier l'amour divin sur lequel on se débarrasse allègrement du cri<br /> de ceux qui souffrent, et mille autres formes perverses.<br /> <br /> <br /> Il n'y a pas d'amour vrai sans le temps, la persévérance (bien d'accord), le combat... sans souci de la justice et de la solidarité. Il n'y a pas d'amour vrai non plus, sans raison, voire sans<br /> rationalité. Mon côté catho irréductible me rappelle une chose : l'amour du Christ et celui qu'on lit ici et là dans l'expérience biblique n'avaient rien de sentimental. C'était un amour créatif,<br /> de construction des personnes, d'alliance responsable, de compassion sans identification, de lutte contre les emprises des religieux sur les consciences, d'écoute de la douleur des petits... et<br /> surtout de présence et d'identification auprès des exclus des structures (structures socio-économiques et structures mentales).<br /> <br /> <br /> Aujourd'hui chez nous, ils s'appellent : vieillards abandonnés dans des maisons de retraite, malades isolés, chômeurs en fin de droit ou sans droits, victimes de racisme ordinaire, femmes<br /> battues, hommes humiliés sans raison, sans abris, dépressifs et suicidaires, analphabètes et rejetés de nos systèmes éducatifs, sociaux et sanitaires (et il y en a). Ceux-là, ils n'étaient pas<br /> présent à la Bastille hier soir (et encore moins au siège de l'UMP). C'est différent de la Birmanie, mais pas si éloigné. Un véritable amour ne consiste pas, au nom de la dignité de la personne<br /> humaine, à culpabiliser les exclus en disant que "c'est de leur faute s'ils sont ainsi" (comme je l'ai entendu de la part de chefs d'entreprise bien pensants et politiquement corrects !), ni les<br /> entretenir dans un assistanat (au nom d'une pitié condescendante et finalement méprisante), mais de réfléchir avec les moyens de la raison aux causes et aux structures qui mènent à ces<br /> exclusions. Et ensuite de responsabiliser et d'offrir des moyens à ces gens en lien avec une vraie, solide et persévérante solidarité.<br /> <br /> <br /> Nos démocraties pensent qu'elles sont à la fois le pouvoir de la majorité et le respect du droit des minorités. OK, c'est vrai. Mais elles ne doivent oublier aussi les sans droits, sans-droits au<br /> point de vue juridique et sans-droits au point de vue mental (parce qu'en dehors des bonnes consciences). J'espère qu'Hollande ne l'oubliera pas et ne se laissera pas ficeler par ceux qui l'ont<br /> élu. Peut-être devrait-il aller voir le film de Besson avant de commencer son boulot ? Moi j'irai le voir, ce film.<br /> <br /> <br /> Je sais, en tant qu'intello, que je suis mal placé pour affirmer ces propos. Mais ce n'est pas le doigt qui importe, c'est la direction qu'il montre et la conviction avec lequel il la montre. Je<br /> les dis et essaie de les transmettre à d'autres dans l'espoir (timide) que ceux qui ont les moyens d'agir le fasse avec persérance, justice et amour -le petit plus, indéfinissable, qui est la clé<br /> de voûte, mais dont on doit parler avec réserve et analyse critique-. Pas d'amour sans pervérance, pas d'amour sans justice, pas d'amour sans créativité, pas d'amour sans solidarité...<br /> <br /> <br /> Merci Lolo.<br />